Souveraineté, démocratie, mondialisation – le trilemme de Rodrik

Souveraineté, démocratie, mondialisation – le trilemme de Rodrik

Les chamboulements économiques récents remettent en question la mondialisation intense en place depuis plusieurs décennies. Gaspard Koenig s'interrogeait récemment sur la pertinence de la politique européenne, soudainement libérale, face à des États-Unis plus protectionnistes. Au sein du raisonnement, le chroniqueur mentionne les limites d'une mondialisation à outrance en insistant sur les compromis qu'elle impose. En particulier, il cite le trilemme d'incompatibilité de Rodrik, qui stipule qu'un état ne peut maintenir de façon stable une souveraineté, un fonctionnement démocratique et une économie fortement mondialisée. Tout au plus, seules deux des propriétés sur les trois peuvent être maintenues.

Mondialisation et démocratie et l'on renonce à la souveraineté. L'exemple de l'Union européenne apparaît, où la gouvernance des états a été largement transférée à celle de l'Union, qui promulgue des directives et oriente de nombreux financements.

Mondialisation et souveraineté et l'on renonce à la démocratie. On observe alors le fonctionnement de la Chine, dont l'économie est ouverte sur le monde mais qui, entre autres, contrôle les grandes entreprises et le fonctionnement du marché intérieur.

Souveraineté et démocratie et l'on renonce à la mondialisation totale. Peu d'exemples actuels existent à ma connaissance, mais Rodrik citait les nations occidentales à l'époque des accords de Bretton Woods (1944), avant leur dénonciation trente ans plus tard avec les accords de la Jamaïque (1976).

La politique du président Trump d'instaurer des barrières douanières a pour effet direct de juguler la mondialisation. Étrange, car celle-ci faisait des américains les rois du monde, si ce n'est par leur déficit commercial avec la Chine. Cette politique pourrait à court terme engendrer un ralentissement de la croissance et un appauvrissement généralisé dans le pays, ce qui est un risque politique significatif. Mais à plus long terme, la démondialisation pourrait réindustrialiser le pays et par cela y réduire les inégalités de revenu, atténuant la supposée frustration des classes moyenne et populaire d'être méprisé par une élite.

Jusqu'où la vague du protectionnisme ira-t-elle? L'économie n'aime pas la brutalité et le manque de visibilité. Espérons que les changements opérés outre Atlantique ne seront pas trop violents, ce qui n'arrangerait personne. Et que l'opération permettra d'atteindre une mondialisation plus raisonnée. Selon Rodrik, démocratie et souveraineté ne s'en porteront donc que mieux.

PS: amis lecteurs, je ne suis pas économiste, votre lecture de la situation sera la bienvenue !